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Hiram & la légende d’Hiram en franc-maçonnerie

Hiram est un personnage Biblique, il est le fils d’un Tyrien et d’une veuve de la tribu de Nephthali (d’où l’ appellation Les enfants de la veuve pour parler d’un franc-maçon). Hiram est un artisan du bronze Phénicien souvent défini comme “le prince des architectes”. Il est également appelé Hiram Abi, Hiram Abiff (avec un ou deux F), Houram et même Adoniran dans le livre de Gérard de Nerval “Le mythe d’Hiram et l’initiation du maitre maçon”.

Hiram fut envoyé par le roi homonyme Hiram 1er, Roi de Tyr, à Salomon, fils de David et Roi de Judée, bâtir un temple sur le mont Moria afin de protéger l’Arche d’Alliance, contenant les Tables de la Loi. Le premier livre des rois le décrit d’ailleurs Hiram comme spécialiste du travail du bronze, rempli de sagesse et de connaissance. Hiram réalisa la décoration du Temple, moula et dressa les colonnes Jakin et Boaz ainsi que la mer d’Airain qui reposait sur douze boeufs de bronze sur le parvis du temple.

Dans le livre de Gérard de Nerval ci-dessus cité il est indiqué qu’ il est à la tête de légions d’ ouvriers, plus de cent mille artisans fondeurs, maçons et tailleurs de pierre et qu”il avait établi non loin du temple inachevé des forges d’ où sans cesse retentissaient les marteaux des fonderies souterraines …”

Toute fois il est honnête de mentionner que dans les écritures et textes bibliques Hiram ne joue qu’un rôle secondaire qui a été amplement magnifié en maçonnerie qui a fait de l’artisan un architecte ainsi que “le maçon le plus accompli de la terre”. Dans les Constitutions d’Anderson il subit un destin dramatique qui deviendra conte initiatique et base spirituelle et rituelle de la maçonnerie spéculative. En maçonnerie moderne et notamment dans les constitutions d’Anderson rédigées en 1721, Hiram est notamment évoqué (modification du texte de 1723 puis seconde édition de 1738) comme un point central de la pratique maçonnique.

La légende d’Hiram est en franc-maçonnerie l’initiation de passage à la maitrise. Ce passage au troisième grade a été divulgé notamment dans le manuscrit Graham de 1726 puis dans Masonry dissected de Samuel Prichard en 1730.

Au fur et à mesure des années et suivant les pays, la Légende d’Hiram a évoluée en gardant toute fois des bases communes : le temple de salomon comme cadre de la légende, le métier d’architecte d’ Hiram et le fait qu’il soit détenteur d’ un double secret : celui du savoir faire ainsi que du mot de passe des maitres.

“Les ouvriers du chantier du Temple étaient séparés en trois catégories identiques à nos loges actuelles: apprentis, compagnons et maitres recevant chacun leur salaire du à l’aide d’un mot de passe secret les différenciants.”

Dans la légende trois compagnons dont les noms varient : Jubelo, Jubela, Jubelum ou Giblon, Giblas, Giblos se postèrent chacun à l’une des trois portes du temple. Tour à tour ils exigèrent d’Hiram qu’il révèle le mot secret des maitres ce qu’il refusa. De cette vilainie surviendra la mort du Maître et le mythe de la parole perdue/retrouvée.

Ce mot secret est d’ailleurs différent que l’on lise Masonery Disected ou la version primitive de Graham mais une synthèse sur le sujet sera adoptée par le GOdF le 12 aout 1785.

Il est interessant de noter que suivant les rites le nombre de personnes qui partirent chercher l’architecte varie : 15 ou 12 aux rituels anglophones, 9 au rite français. Les initiales de la parole secrete se retrouvent d’ailleurs sur de nombreux modèles de tabliers de Maitres au RF et REAA.

Il est enfin à noter que dans “Le mythe d’Hiram et l’initiation du maitre maçon” les trois compagnons sont également nommés Amrou, Phanor et Méthousael et que venant révéler au roi Salomon qu’ Adoniram avait une passion pour la reine des Saba Balkis que convoitait le roi des hébreux, ce dernier les mit au défi d’ obtenir le mot secret des maitres de la part d’Hiram avant le jour suivant comme bonne preuve de la confiance du Maitre en ces trois compagnons et de fait de l’honneteté de leurs propos.

C’est ainsi que de peur de représailles du roi Salomon, les trois compagnons furent tenus d’ extorquer le mot de maitre ou bien de consentir à faire dispaitre Hiram.

Quoi qu’il en soit, Hiram emportera son secret avec lui dans la mort. Une fois trouvé le corps d’ Hiram fut entéré par Salomon sous le saint des Saints de son Temple. Dans le manuscrit Wilkinson de 1727 l’on précise que la forme de la loge est un carré long en référence à la forme de la tombe du Maitre Hiram.

Le grade de Maitre est un grade récent, créé fin XVIIème début XVIIIème siècle puisqu’avant “la loge des compagnon” était dirigée par une personne qui était de fait Maitre mais le statut de maitre n’était pas reconnu comme grade mais bien comme fonction alors pourquoi le mythe et la légende d’ Hiram en maçonnerie si récent est-il si central ?

Si le Regius, l’une des plus ancienne Old Charges connu (1390) attribu au roi Nemrod batisseur de la tour de Babel le titre de Premier et très ancient Grand Maître c’est à partir du XVIIIème siècle que le Temple de Jérusalem et Salomon sont alors définis comme point initial de la maçonnerie.

Il faut rappeler qu’à l’origine de la maçonnerie était demandé à la loge-mère de toutes les loges calvinistes d’Ecosse de pratiquer l’art de mémoire, lequel était traditionnellement basé sur un langage allégorique.

Le mythe est un système dynamique de symboles et d’archétypes en voie de rationalisation dont la légende d’Hiram est point par point une allégorie de la passion, de la mort et des funérailles de Jésus. La mort et la résurection lors de la Légende d’Hiram nous permet alors de passer de l’équerre au compas, de l’ombre à la lumière.

L’allégorie de construction du temple nous amène quand à elle à la construction du genre humain. Au travers un salut global et individuel. Hiram propose que chacun d’entre nous, dans sa diversité, à son grade, dans son intelligence et son savoir, s’inscrive dans l’entreprise qui pousse les hommes à bâtir leur existence commune autour de la recherche de la vérité, de la lumière et d’une vie collective pacifiée.

“C’est dans l’abnégation que chaque affirmation s’achève,

Tout ce que tu résignes en toi prendra vie. Tout ce qui cherche à s’affirmer se nie ;

tout ce qui se renonce s’affirme.

La possession parfaite ne se prouve que par le don.

Tout ce que tu ne sais pas donner te possède. Sans sacrifice il n’est pas de résurection. Rien ne s’épanouit que par offrande. Ce que tu protège en toi s’atrophie.”

André Gide – Les nouvelles nourritures

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Alexis AT

Français expatrié à Moscou *** Grand Inspecteur National en charge du développement Europe de l'Est @ GLTF

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