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L’Ecosse maçonnique entre mythes et réalités.

S’il est bien un sujet qui à fait, fait et fera encore couler beaucoup d’encre, c’est bien les rapports de la franc-maçonnerie à l’Ecosse et très réciproquement.

On peut légitimement se poser la question du pourquoi de l’attachement de la Maçonnerie à l’Ecosse puisque nous pouvons le constater plusieurs rites et grades maçonniques se qualifient d’écossais. C’est ce que nous appelons encore l’Ecossisme, souvent injustement associé au Rite Ecossais Ancien & Accepté puisque de nombreux rites maçonniques sont écossais même s’ils n’en affirment en rien d’épithète.

Alors, dans un premier temps nous allons définir l’Ecossisme, ce mouvement qui persiste et perdure encore en ce début du 21ième siècle.

Nous verrons ensuite quels sont les liens réels ou supposés de la maçonnerie avec l’Ecosse. Enfin nous pourrons en tirer quelques conclusions.

Alors, concrètement, l’Ecossisme c’est quoi ?

L’écossisme est un mouvement né dans les années 1735-1740 et dont la paternité est attribuée à Michel André de Ramsay, noble écossais qui était le Grand Orateur de de la première Grande Loge de France. Il se rendit célèbre par la rédaction et la lecture en tenue d’un discours dans lequel il affirmait que la Maçonnerie ne descendait plus des Compagnons opératifs, des bâtisseurs de cathédrales mais de la Chevalerie et des Croisés. Voici le passage de son discours qui concerne les origines chevaleresques de la Franc-Maçonnerie :

INSTITUTION DE L’ORDRE PAR LES CROISÉS

Du temps des guerres saintes dans la Palestine, plusieurs Princes, Seigneurs et Citoyens entrèrent en Société, firent voeu de rétablir les temples des Chrétiens dans la Terre Sainte, et s’engagèrent par serment à employer leurs talens et leurs biens pour ramener l’Architecture à primitive institution. Ils convinrent de plusieurs signes anciens, de mots symboliques tirés du fond de la religion, pour se distinguer des Infidèles, et se reconnoître d’avec les Sarasins. On ne communiquoit ces signes et ces paroles qu’à ceux qui promettoient solemnellement et souvent même aux pieds des Autels de ne jamais les révéler. Cette promesse n’étoit donc plus un serment exécrable, comme on le débite, mais un lien respectable pour unir les hommes de toutes les Nations dans une même confraternité. Quelques temps après, notre Ordre s’unit intimement avec les Chevaliers de S. Jean de Jérusalem. Dès lors et depuis nos Loges portèrent le nom de Loges de S. Jean dans tous les pays. Cette union se fit en imitation des Israélites, lorsqu’ils rebâtirent le second Temple, pendant qu’ils manioinent d’une main la truelle et le mortier, ils portoient de l’autre l’Epée et le Bouclier.

La grande révolution apportée par cet extrait est la revendication que la Franc-Maçonnerie ne descend plus seulement des Compagnons et des bâtisseurs de cathédrales ; elle descend aussi et surtout des Croisés et des Chevaliers.

A partir de ce moment, de cette époque, nous allons assister à une floraison de nouveaux grades, ceux que l’on va appeler les grades « écossais » et très inspirés par la Chevalerie. Ils s’appellent « chevalier de… » (Chevalier de l’Arche Royale, Chevalier d’Orient, Chevalier de l’Épée, Chevalier Kadosch, Chevalier de la Palestine, sans oublier le Chevalier de Dieu et de son Temple, et d’autres encore…). D’ailleurs, ces grades existent toujours dans différents systèmes maçonniques, le Rite Écossais Rectifié, notre rite, n’échappant pas à cette règle.

Ce foisonnement de hauts-grades ou de degrés se situant au-delà de celui de Maître Maçon a abouti à la formation de différents systèmes  dits « écossais » dont l’agrégation contribuera à la formation de plusieurs rites dont le Rite Écossais Rectifié, le Rite Français ou encore Rite Écossais Ancien et Accepté.

Les Loges Ecossaises

Nous pouvons alors nous poser la question de l’origine même de l’épithète « Écossais ». Pourquoi les Loges se qualifient-elles d’« écossaises » ?

Cette question est d’autant plus intéressante que le Très Illustre et Révérendissime Frère Pierre Noël, éminemment membre de la Loge de recherche Ars Macionica à Bruxelles écrivait en 2005 sur une liste Maçonnique qu’il a fallu attendre 1738 pour que la Grande Loge D’Écosse connaisse le degré de Maître Maçon. Or en 1736, soit deux années plus tôt, apparaissent en France d’autres degrés appelés « Écossais ». Nous sommes là devant une évidence : Les degrés Écossais ne venaient pas d’Écosse. D’Angleterre peut-être, mais certainement pas d’Écosse. Alors, pourquoi l’Écosse ?

Une Légende Maçonnique largement répandue veut qu’au moment de l’arrestation des Templiers le vendredi 13 octobre 1307, Pierre d’Aumont, alors Grand Maître de la Province d’Auvergne de l’Ordre du Temple, réunit des Templiers qui n’étaient pas capturés. Ils s’habillèrent en Maçons et fuirent vers l’Écosse où ils rejoignirent d’autres Templiers en exil. Hébergés par le Roi Robert Bruce, ils perpétuèrent l’Ordre du Temple. En 1314 ils aidèrent le Roi d’Écosse à remporter la bataille de Bannockburn et gagnèrent ainsi son estime. Ce Roi fonda pour eux l’Ordre de Saint André du Chardon qui existe toujours et qui est l’Ordre Écossais le plus important. Cet Ordre se déplaça à Aberdeen, puis à Kilwinning où fut fondée avant 1599 par les membres de cet Ordre la première loge[1] Maçonnique Écossaise – géographique – .

Statuts Schaw

Les Stuarts

Mais la légende continue avec la dynastie des Stuarts, et voici comment :

Le petit-fils de Jacques Ier d’Écosse, Jacques II, est proclamé Roi d’Angleterre, d’Écosse et d’Irlande en 1685. Il semble faire preuve d’un catholicisme intransigeant et surtout, il voue une admiration sans bornes à Louis XIV, Roi de France.

Après la prise de pouvoir de son gendre Guillaume d’Orange, Jacques II Stuart s’installe définitivement à Saint Germain en Laye en 1689. Une partie de sa cour et de son armée l’ont accompagnée. Ses régiments[2] sont composés d’Irlandais et d’Écossais restés fidèles à la monarchie Catholique, ceux que nous appelons les Jacobites et dans les rangs desquels figurait un certain… Ramsay.

Penchons-nous un peu sur la vie de Ramsay, elle pourrait éclairer bien des choses sur la filiation Stuart :

Ramsay et la filiation Stuart

André-Michel de Ramsay, est né à Ayr, en Ecosse, en 1686. Il est d’une noblesse très ancienne, apparentée au duc d’Atholl. On trouve également une branche des Ramsay  en France, en Beauce.

Le père de Michel était calviniste ; sa mère était anglicane. A la fin du XVIIe siècle, les querelles religieuses étaient fortes en Ecosse.

En 1709 Ramsay arrive en France pour la première fois. Anecdote intéressante, il devient l’hôte puis le disciple de François de Salignac de La Mothe-Fénelon, autrement dit Fénelon, l’écrivain et théologien de renom.

Peu après la mort de celui-ci il part à Rome où il réside auprès de Jacques III Stuart[3]. Il devient le précepteur du jeune Charles-Edouard[4], fils de ce dernier. Il revient à Paris en 1724 où il fréquente le Club de l’Entresol, société de pensée qui réunit des gens de qualité pour examiner les grands problèmes de l’époque qui sera dissout par le jeune Louis XV et ceux qui l’entourent.

En 1728, Michel de Ramsay est en Angleterre. Il est admis dans deux compagnies scientifiques de la plus haute renommée : The Gentlemen’s Society et la Royal Society. Cette dernière ayant été fondée, au siècle précédent, par le savant et alchimiste Elias Ashmole.

Pendant son séjour à Londres, Ramsay fut l’ami d’un dénommé Anderson, fondateur de la Mère Loge de 1717 également rédacteur des Constitutions éponymes qui restent aujourd’hui encore les règles fondamentales de la Franc-Maçonnerie. En mars 1730 Ramsay est initié à la « Horn Lodge » à Londres. Il retourne ensuite en France où il fréquente la Loge « Le Louis d’Argent » à Paris, une des plus anciennes loges du Royaume de France.

En 1735 Michel André de Ramsay se marie. Elle se nomme Marie de Nairn, elle a 24 ans[5] et elle est la fille d’un noble Écossais de haut lignage, le baron David de Nairn, héraut d’armes de l’Ordre du Chardon d’Ecosse, ordre chevaleresque dont les Stuarts sont les Grands Dignitaires.

Une légende veut que cet ordre ait été créé en 1314 par le roi d’Ecosse Robert Bruce, après sa victoire de Bannockburn, afin de récompenser les Templiers qui, réfugiés en Ecosse après l’inique procès, avaient largement contribué à la défaite des Anglais. Il s’agit en fait d’un authentique Ordre Chevaleresque créé en 1687 par Jacques II Stuart pour récompenser ses fidèles et qui compte une vingtaine de Chevaliers. Cet Ordre existe toujours et son Grand Maître actuel n’est autre que Charles III, Roi de Grande Bretagne.

Dès 1735 commence de circuler, sous le tablier dirons-nous, le fameux Discours de Ramsay.

Michel de Ramsay meurt à Saint-Germain-en-Laye, le 7 mai 1743. Il a laissé par son discours une trace indélébile dans la Franc-Maçonnerie.

La Légende Maçonnique

La légende veut qu’au sein des régiments de cette armée en exil il y eu des Loges Maçonniques dont nous connaissons les noms : La Bonne Foy et La Parfaite Égalité, et qu’elles pratiquaient le rite en usage en Écosse à ce moment-là. C’est ce rite qui aurait été importé en France par les Jacobites.

Je parle d’une filiation légendaire car à ma connaissance nous n’avons pas de trace de ces loges avant le milieu du 18e siècle. Lorsque le Grand Orient de France, le 13 mars 1777, a intégré la Bonne Foy, il a été précisé que sa date de fondation était antérieure à 1700 sans aucune référence documentaire.

Le mot Écossais fait donc référence aux origines légendaires chevaleresques et écossaises voire templières de la Franc-Maçonnerie. Pour simplifier, dès que nous entendrons le mot « écossais », nous l’associerons aux hauts grades, donc aux grades qui sont au-delà des 3 premiers et qui sont Apprenti, Compagnon et Maître Maçon, donc aux grades de Chevalier…

Faisons une parenthèse : Derrière le mot Chevalier, dans l’esprit du 18e siècle, se cache le mot « noble ». Un noble du 18e siècle est appelé par son titre, son quartier de noblesse. Le Chevalier est, à cette époque puisque ça n’était pas le cas au moyen âge, le premier échelon de l’échelle nobiliaire. Dire que la Maçonnerie descend de la noblesse, c’est permettre aux Frères roturiers, bourgeois et artisans, d’accéder ne serait-ce que symboliquement à une noblesse héréditaire. Le Chevalier porte l’épée accrochée au baudrier. Dans les Loges, nobles, bourgeois et artisans la portent librement. Ils la porteront vraisemblablement jusqu’à la fin de la restauration en 1830 et au Rite Ecossais Rectifié cette tradition perdure toujours.

Dans les années qui suivirent l’écriture et la diffusion du fameux « discours », de nombreux grades maçonniques vont apparaître, pour ne pas dire fleurir. De 1736 à 1773 toutes les Loges Françaises auront et pratiqueront des degrés supérieurs à celui de Maître Maçon, influencés par la Chevalerie.

Vers 1740-1744 apparaît en France une divulgation appelée « Le Parfait Maçon ». Il est fait mention de 4 grades : Apprenti, Compagnon, Maître et Maître Écossais. Le rituel de ce dernier degré est très proche de celui de l’Ordre du Chardon d’Écosse. Son symbolisme emprunte clairement au discours de Ramsay dont nous savons maintenant qu’il avait un lien au moins indirect avec cet ordre.

Parmi les différents systèmes chevaleresques vont éclore dans les Loges, certains auront plus d’importance que d’autres au moins pour ce qui nous concerne… Je pense au Chapitre de Clermont formé en 1754 qui comprenait 2 grades : Chevalier de Saint André du Chardon d’Écosse et Chevalier de Dieu et de son Temple. Ce dernier grade est une allusion évidente et directe à l’Ordre du Temple.

Mais concrètement, que s’est il passé en Ecosse au début du XVIIIe siècle ?

Nous sommes alors très loin de la réalité de la Maçonnerie de l’Ecosse géographique. Les Français s’inventent en 1736 des grades Ecossais… Et les loges écossaises d’Ecosse géographique officialisent le 3e grade, celui de Maître Maçon en 1738…

En Ecosse 2 courants maçonniques vont s’opposer :

  • Une maçonnerie historique, issue du métier qui va vite péricliter.
  • Une maçonnerie nouvelle, portée par les hanovriens, un club pour aristocrates et bourgeois en mal d’occupations né spontanément au début du 18e siècle à Londres…

C’est évidemment la maçonnerie des vainqueurs qui va triompher. Les Rois Jacobites en exil à Rome ou en France possèdent leur propre maçonnerie qui leur sert de réseau de renseignement. De même les Hanovre se servent de la Grande Loge de Londres afin de collecter des informations sur les jacobites. Parfois les frères se reçoivent, parfois ils ne se reçoivent pas… Rien ne différencie concrètement les maçonneries Jacobites et Hanovriennes qui sont des maçonneries modernes, aristocratiques, bourgeoises, très éloignées des loges issues du métier qui subsistent encore en Ecosse. Ces loges vont subir l’influence de la maçonnerie hanovrienne, découvrir le 3e grade et accepter des membres non issus du métier… Elles vont se transformer jusqu’à devenir des loges spéculatives. Le cas le plus concret est la loge d’Edimbourg dont certains textes sont très anciens et dont un compte rendu de loge fait mention de la visite d’un pasteur dénommé Desaguliers, qui s’étonne qu’il ne fût pas du métier mais qu’il connaissait le mot de Maçon… Nous sommes en 1721[6].

Ces loges issues du métier vont très vite disparaître… Aujourd’hui elles n’existent plus du tout. Elles vont adopter les usages de la maçonnerie d’Angleterre, celle des Hanovre, tant dans la forme que dans le fond, jusqu’à revendiquer certains grades qu’elles méconnaissaient en 1738…

En 1751, Maçons Irlandais et Ecossais de Londres qui ont été refusées en visites par les loges anglaises londoniennes mais pratiquant jusque-là des rituels proches de ceux de la Grande Loge des Modernes – la Grande Loge de Londres et d’Angleterre – vont se fédérer afin de créer la Grande Loge de la très ancienne et honorable fraternité des maçons francs et acceptés… encore connue sous le nom de Grande Loge des Anciens. Parmi ses revendications, il y a :

  • L’installation du Vénérable Maître en chaire de Salomon, ce que nous appelons l’installation secrète.
  • L’inversion de J et de B, B devant être pour les Apprentis et J pour les Compagnons…
  • La position des Surveillants en Loge ; à savoir que le 1er Surveillant est à l’Occident en face du Vénérable Maître
  • L’usage du degré de l’Arche Royale comme complément au grade de Maître Maçon
  • La re christianisation des rituels.

L’histoire nous la connaissons. En Angleterre les 2 obédiences vont s’unir en 1813 pour fonder la Grande Loge Unie d’Angleterre.

En Ecosse cela va être un peu différent. La Grande Loge d’Ecosse naît en 1736 à un moment où la majorité des loges ne possèdent que 2 grades. Avec l’influence croissante des Hanovre, cette maçonnerie va profondément évoluer. D’opérative elle devient ouvertement spéculative avec l’ajout de nouveaux grades. De ces mutations naîtra au cours du 19e siècle le rite qu’elle utilise toujours et qui est celui appelé le Standard d’Ecosse et dont la version que les français connaissent date des années 1960…

Aussi, la trame rituelle utilisée aujourd’hui en Ecosse est très proche de ce qui fut la maçonnerie des Antients auquel a été ajouté le degré de Maître de la Marque. L’origine de ce grade est très controversée ; on trouve sa plus ancienne trace à Portsmouth, en 1769, dans le sud de l’Angleterre. Et comme c’est en Compagnon que l’on doit rentrer dans une loge de Maître Maçon de la Marque, des loges Ecossaises confèrent parfois ce grade après celui de Compagnon.

Qu’est ce qui me permet d’affirmer que les rituels des jacobites en exile en France ou à Rome étaient des rituels “Moderns” ? J’ai la chance de possèder une étude publiée en 1910 par William James Hughan de la Loge de recherche de Leicester n°2429. Cette étude intitulée “A jacobite Lodge at Rome, 1733-7” possède un fac-similé des minutes de cette loge qui se réunit 12 fois et ô surprise, cette loge purement jacobite à laquelle a appartenu Allan Ramsay Jr ne possède aucune fonction de “Deacon” (les Diacres que l’on trouve au rite Antients). En revanche elle possède naturellement un “Maître” de Loge (The Master, parfois appelé Great Master) et deux Surveillants (Wardens) sans préciser s’ils sont Senior (Premier) ou Junior (Second). Aucune des autres fonctions ne sont précisées.

Fait intéressant, cette Loge a naturellement reçu plusieurs officiers Français visiteurs le 28 février 1736 qui ne se sont en rien offusqués du rituel. Le Secrétaire était ce soir là un Français qui écrit le compte rendu de la soirée suivant :

Le 28 de Fevrier fut tenu chez Dion une Loge de
vrais e parfait Massons, dans laquelle furent reçus
dans la forme et selon les cérémonies nécessaires dans
notre ordre, Mr. le Conte de Cronstadt, Suedois, Mr.
le Vidame de Vassi, Colonel de Cavalerie au service
du Roy de France, Mr. de Croysman, Capitaine au
regiment de Cassi a laquelle ont assiste.

La cérémonie était donc normale, dans la forme et selon les cérémonies nécessaires selon les termes des minutes… Nous pouvons en conclure qu’elle était “Moderns”, rite pratiqué en France et n’avait rien à voir avec ce que les “Antients” décideront de faire à partir de 1751, inversant les colonnes pour ne pas se mélanger aux anglais et pouvoir les différencier lors du tuilage.

Alors, que conclure de tout cela ?

Conclusion

La maçonnerie écossaise fait encore couler beaucoup d’encre… Beaucoup croient que le Standard d’Ecosse est le rite le plus ancien de la maçonnerie, qu’il a été celui des jacobites, pire, qu’il a été celui des maçons d’Ecosse… Alors que la réalité nous montre que les loges opératives qui ont accepté les premiers spéculatifs n’ont vraisemblablement eu beaucoup de choix autre que celui d’accepter le rite maçonnique du vainqueur anglais. Il faut rappeler que les guerres jacobites vont durer jusqu’en avril 1746, au moment de la défaite de Culloden qui marquera la fin temporaire du système clanique écossais.

Les mythes sur l’origine écossaise de la maçonnerie ont été portés par Robert Ambelain qui croyait dur comme fer que les premiers maçons spéculatifs étaient arrivés dès 1688 en France à la suite de Jacques II Stuart, lors de son exil en France ; il a même créé un rite prétendument jacobite pour cette occasion, le Rite Ecossais Primitif alors que nous venons de voir que même les loges jacobites en exil utilisaient des rituels “moderns”, à savoir ceux de la première Grande Loge de Londres. Oui, un mythe s’effondre grâce à cette étude de 1910… Alors se peut il qu’il y ait eu des maçons opératifs jacobites à Saint Germain en Laye en 1689 ? Peut être, mais il n’existe aucune trace d’eux, absolument aucune et l’affirmer n’est que pure spéculation. En revanche, nous avons apporté la preuve qu’en 1731, les jacobites utilisaient des rituels semblables à ceux de la Grande Loge de Londres…

Quand à la filiation templière, laissons là où elle est, dans les légendes des rituels maçonniques…

L’Ecosse, terre de mythes et légendes maçonniques, n’a pas fini de faire parler d’elle.


[1] Il est fait mention de l’existence de cette loge dans la seconde édition des Statuts Shaw du 28 décembre 1599

[2] Il est intéressant de remarquer que pendant longtemps la France a conservé des régiments écossais et irlandais au sein de son armée.

[3] Il s’agit du fils de Jacques II, encore surnommé « le vieux prétendant ».

[4] Connu en Ecosse sous le nom de Bonnie Prince Charlie.

[5] Il en a alors 46.

[6] Jean Théophile Désaguliers semble avoir visité à plusieurs reprises Saint Mary’s Chapel, en fait la loge historique d’Edimbourg à ce moment-là. Sa première visite notable est celle du 24 août 1721 et on peut s’interroger sur ses motivations à visiter cette superbe ville à ce moment-là, alors que nous sommes en pleines guerres jacobites.

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Laurent Jaunaux

Initié en 1991 à Rueil Malmaison à la loge Omnes Fratres (GLDF), auteur de "le rituel des anciens ou édition 2004 du Guide des Maçons Ecossais" publié chez Dervy, Passé Grand Maître de la GLERRO, Fondateur du Rite Moderne d'Ecosse et membre de la Grande Loge Franco-Maltaise.

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