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De l’Ordre Symbolique Humain (partie 1/2)

Les trois champs de la connaissance. 

La question de comprendre ce qu’est le « connaître » est d’une nature évidemment philosophique, de même que la distinction qui est à faire entre la connaissance et le savoir. Il semble, cependant, que la capacité de connaître et la connaissance qui en résulte ont à voir avec une modification de l’être, une évolution ontologique du sujet, comparable aux processus de germination végétale ou de génération animale. Autrement dit, connaître, ainsi que la langue française le suggère, est une action intimement associée à la conception, à l’acte de naissance et d’une manière plus générale, au phénomène de la procréation. Par conséquent, le processus qui conduit de l’inconscience originelle à la connaissance est davantage proche des processus physiologiques, et donc vitaux, que ne l’est le processus allant de l’ignorance au savoir, lequel paraît être d’un ordre purement accumulatif et quantitatif. Si bien que le « connaître » confère à l’être une propriété qualitative supplémentaire, un élargissement de sa conscience, un progrès spirituel, qui modifie l’usage qu’il peut faire de la quantité de savoir acquis. Finalement, entre le savoir et la connaissance, l’écart est identique à celui existant entre science et sagesse. Nous dirons donc que si le savoir est ce qui procure un accroissement de la science du sujet, faisant de lui un savant, la connaissance le renouvelle, le recrée, en lui donnant la sagesse et en faisant de lui un être sage. Le premier concerne la capacité du sujet, la seconde concerne son humanité.

D’autre part, il n’est pas contestable que l’être humain, en découvrant le monde qui l’entoure et le monde qui le constitue, doit faire face à une réalité dont le visage est triple. En effet, tout être humain est d’abord confronté à ce que nous appelons le réel et celui-ci lui oppose, par son caractère tangible, une nécessité, une dureté telles qu’il est forcé d’agir, d’entreprendre, de travailler, pour pouvoir vivre. Ensuite, ses insuffisances, ses incapacités, ses limites physiques ou intellectuelles, le conduisent à trouver dans son activité imaginative un moyen de les compenser ; l’imaginaire apparaît alors comme un univers de secours, un refuge, une consolation, dans la mesure cependant où cet univers peut être contenu sans atteindre les débordements du délire ou les dangers de la passivité rêveuse. Enfin, l’existence du langage est la preuve de la possibilité d’une activité symbolique grâce à laquelle l’être humain est capable de communiquer à son prochain ses propres expériences, ses états émotionnels ou ses créations imaginaires, les mots, le Verbe en général, le Logos, étant le type même des symboles. Réel, imaginaire et symbolique sont les trois modalités de la connaissance (figure 1).

La notion d’espace symbolique

Il n’est pas utile, dans le cadre de ce travail, de revenir sur la définition des symboles, mille fois détaillée dans de nombreux ouvrages. 

Nous savons, en effet, que tout symbole est une forme qui donne à voir à l’esprit une ou plusieurs autres significations que celle qu’elle donne immédiatement à percevoir, et que ces significations peuvent être classées dans le registre du « caché », c’est-à-dire de ce que l’on ignore a priori. Ainsi, un symbole peut être rapproché de cette figure de style, de ce trope qu’est la métaphore, laquelle consiste, comme son étymologie l’indique, à transporter à côté la signification d’une chose pour mieux l’expliciter. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que les psychanalystes, à la suite de Jacques Lacan (1901-1981)[1], aient eu recours aux figures de style de la langue dans le but de faire entendre les formes d’expression de l’inconscient.

Mais, déjà Sigmund Freud (1856-1939) a rendu compte très tôt de la dimension symbolique des symptômes psychiques. En effet, ceux-ci peuvent être considérés comme les éléments d’un langage à déchiffrer, éléments renvoyant toujours à un vécu infantile structuré par les premières relations intrafamiliales. De la même manière, le rêve est devenu, depuis les travaux de S. Freud, un récit à déchiffrer et déchiffrable construit par l’amalgame de deux contenus, l’un manifeste et l’autre latent et caché[2]. Tout rêve est ainsi apparu comme un symbole dont le sens est à rechercher dans les nombreuses associations d’idées que l’esprit humain engendre sur la base de son contenu conscient et manifeste.

Mis à part les symptômes et les rêves, la psyché humaine emploie d’autres moyens d’expression comme les actes manqués, les lapsus, les mots d’esprit qui, dans leur ensemble, forment une sorte de langage obscur et cependant connaissable. De plus, la pratique médicale confronte le médecin à une autre forme de langage qui est ce que nous appelons le langage spatial, c’est-à-dire un langage corporel tenant au positionnement choisi par un patient face à son thérapeute. En effet, nous avons observé que tout patient utilise inconsciemment l’espace du lieu de consultations pour dire à son médecin quelque chose de son histoire personnelle. Voici ce qui est dit : en supposant que le bureau du thérapeute propose aux patients un choix de deux fauteuils, il existe des sujets qui choisissent tout naturellement le fauteuil situé sur leur côté droit et des sujets qui, au contraire, font systématiquement le choix du fauteuil situé sur leur côté gauche. Face au thérapeute, il existe donc deux catégories spatiales de patients : les « droits » et les « gauches ». Si bien que le langage spatial dont il est question revient à admettre la bipartition de l’espace humain, à analyser les significations des deux parties latérales de l’espace et à découvrir leur symbolisme. C’est, en effet, de la connaissance de leur valeur symbolique que nous pouvons tirer un enseignement sur la place qu’occupent, dans l’histoire de l’être, les origines de sa souffrance. Ainsi, si l’on en croit ce que rapportent les innombrables ouvrages traitant des symboles, le côté droit est intimement associé dans l’esprit humain aux notions de masculinité et de force, d’activité même, telles que les représentent l’homme, le père ou le fils au sein d’une famille. A contrario, le côté gauche est relatif aux notions de féminité, de douceur, de passivité, telles que les incarnent, a priori, la femme, la mère ou la fille.

Enfin, le langage spatial est une manière de dire quelque chose par un moyen symbolique croisé ; il est inconscient chez le sujet, il est employé à son insu et s’adresse à la conscience du thérapeute afin qu’il dispose d’un moyen supplémentaire de connaissance. Le fait pour un sujet consultant de choisir le fauteuil situé de son côté droit signifie que le lieu d’origine de sa souffrance est du côté gauche, c’est-à-dire du côté de la féminité considérée dans son sens le plus général. Il en est strictement inverse pour les sujets consultants qui choisissent le fauteuil situé sur leur côté gauche. (figure 2)

L’anatomie symbolique du corps humain

L’examen visuel du corps humain montre universellement la superposition de quatre parties. De bas en haut, il s’agit de l’étage pelvien, de l’étage abdominal, de l’étage thoracique et de l’étage crânien (figure 3).D’abord, il importe de dire que chacune de ces parties possède une forme bien particulière. Le pelvis, communément appelé le bassin, a une forme triangulaire à base supérieure. L’abdomen ou ventre se distingue par une forme carrée centrée par l’ombilic. Le thorax ou poitrine est reconnaissable, surtout chez l’individu de sexe masculin, par sa géométrie pentagonale. Enfin, le crâne ou tête se différencie en ce qu’il introduit la forme circulaire, la voûte crânienne étant un représentant symbolique de la voûte céleste.

Il va de soi que cette structuration verticale du corps humain met en évidence une disposition spécifique des organes qui le composent. Ainsi, l’étage pelvien est celui des organes de la reproduction, des organes génitaux, ainsi que des organes de l’excrétion, vessie et rectum. L’abdomen comporte les organes de la digestion, les intestins, de l’estomac jusqu’au colon terminal ; en cela, cette partie du corps assure l’entretien de l’individu, sa propre conservation par l’absorption de la nourriture et son assimilation.  

Le thorax inclut à la fois l’organe de la circulation sanguine, le cœur et les vaisseaux, et l’organe de la ventilation, les deux poumons, ces deux types d’organes étant intimement liés par leur fonction respective d’oxygénation et de diffusion du fluide sanguin. Enfin, la partie crânienne du corps contient l’encéphale, les deux hémisphères cérébraux et le cervelet, dont les relations avec le monde extérieur s’établissent par l’intermédiaire des sens et de la sensibilité générale, le cervelet étant l’organe de l’équilibration.

Nous laissons délibérément de côté les systèmes endocrinien, immunitaire, sanguin, ostéo-musculaire et cutané, leur trait commun étant leur fonction globale de protection de l’ensemble de l’organisme.

[1] J. Lacan. Écrits I et II. Paris. Seuil. 1966. (289 p et 244 p.)

[2] S. Freud. Interprétation des rêves. Paris. PUF. 1967. 573 p.

[3] S. Freud. La vie sexuelle. Paris. PUF. 1969. 159 p.

[4] K. Abraham. Œuvres complètes. T 1 et 2. Paris. Payot.1973. (298 p. et 362 p.)

[5] Diogène Laërce. Vie, doctrine et sentences des philosophes illustres. Tomes I et II. Paris. GF-Flammarion. 1965. (314 p. et 310 p.)

découvrez la suite de cet article mardi 13 décembre !

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Salvator CINQUE

Initié en 1972, à "Ère Nouvelle", Or...de Montpellier. Un passage aux "Amis Solidaires", Or...de Meaux. Actuellement, en sommeil, mais l'initiation poursuit son oeuvre. Des livres publiés, dont un "Cours de symbolique générale" et un "Essai d'interprétation de l'ordre symbolique humain."

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